La fin des coupables

Emission « Les Nouveaux Chemins de la Connaissance » du 21 décembre 2012 sur France Culture présentée par Philippe Petit avec Pierre-Henri Castel, directeur de recherches au CNRS Responsable de l’équipe Cesames Cermes3/Cesames Centre de Recherche Médecine, Sciences, Santé, Santé mentale, Société (Université Paris Descartes, Sorbonne Paris Cité), qui publie « Obsessions et contrainte intérieure : de la psychanalyse aux neurosciences Volume 2, La fin des coupables Suivi de Le cas Paramo »(Ed. d’Ithaque, 2012).

« Et oui, la fin des coupables ! Ce devrait être une bonne nouvelle, et peut être en est-ce une ? – l’art de se gouverner soi-même étant aujourd’hui devenu la valeur suprême de l’accomplissement de soi et la contrainte intérieure le pire des maux – la culpabilité après tout est une manière d’empêchement qui ne convient plus à nos mœurs démocratiques qui ne s’embarrassent plus des scrupules et obsessions qui ont pu freiner le libre développement de l’individu au cours de sa longue histoire marquée du sceau de la religion. Tout cela n’est-il pas derrière nous ? Maintenant que nous sommes enfin devenus des individus autonomes, habités de la fierté des conquérants, capables de s’auto-instituer, et de se croire libérer à jamais des entraves de la mauvaise conscience. Si oui, si cela est vraiment derrière nous, si nous sommes sortis de la culture de l’intériorité et que nous ne vivons plus nos obsessions et embarras à la manière d’une épreuve de vérité, il nous faut en tirer les conséquences.

Il nous faut admettre que l’expérience de la culpabilité s’est déplacée et expliquer comment l’obsessionnel a pu céder la place au compulsif. Pourquoi le mal être a migré de l’âme tourmentée au cerveau malade ?
Et ceci, n’est pas une mince affaire.
La fin des coupables ne veut pas dire la fin de la souffrance d’agir. Encore moins la fin de troubles psychiques souvent vécus comme de véritables parasites mentaux.
Car il n’est pas de civilisation des mœurs sans contrepartie psychologique. Et la civilisation de l’esprit qui nous a conduit de la moralisation à la démoralisation pourrait bien nous diriger vers une naturalisation de l’esprit où les parasites de l’agir et du penser deviendraient de simples dysfonctionnements indexés sur des constantes neurobiologiques.
Comme le souligne Pierre-Henri Castel : « les modalités de la maîtrise de soi évoluent : c’est tout. Ni mieux, ni pire ».
Peut-être. Mais sur ce « c’est tout », sur cette fin des coupables, il a apparemment beaucoup de choses à dire ! »

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