La France en face

Compte-rendu par Christine Rousseau publié dans Le Monde Télévision le 28 octobre 2013.

Immigration, banlieue, exclusion, vote FN… Pas un jour ne se passe sans qu’au détour d’un débat, soit cité Les Fractures françaises, de Christophe Guilluy, que Flammarion vient opportunément de rééditer en poche. Cet essai, qui a circulé dans les QG de campagne lors de la présidentielle de 2012, est devenu l’ouvrage de référence pour qui veut comprendre les effets de la mondialisation sur les couches populaires. A commencer par le profond clivage qu’elle a engendré en une vingtaine d’années entre les grandes métropoles, lieu quasi exclusif du dynamisme et des richesses (80 % du PIB y est réalisé), et le reste du territoire où se concentre 60 % de la population.

S’appuyant sur les travaux et la carte des fragilités sociales établie par Christophe Guilluy, Jean-Robert Viallet et Hugues Nancy ont sillonné durant un an cette France d’« en face » – et non d’« en bas » comme certains la nomment non sans mépris. De ce voyage au coeur des territoires, ils ont rapporté un documentaire – produit par Christophe Nick – aussi émouvant qu’édifiant sur ces oubliés de la mondialisation auxquels ici, avec force, ils donnent un visage et une voix.

COMBATTRE CERTAINES IDÉES REÇUES

Qu’il s’agisse de Morgane (19 ans) à Saint-Dizier (Haute-Marne) qui vivote dans l’attente d’un appel de son agence d’intérim, de Medhi à Goussainville (Val-d’Oise) qui a quitté sa cité pour résider, à quelques lieues de là, dans un pavillon qu’il paye aujourd’hui au prix fort de 15 heures à 16 heures de travail par jour, ou d’Alain et Sylviane à Villaines-la-Juhel (Mayenne), incarnation même de la précarité, tous relatent une vie de peu, aux contours incertains, souvent contrainte à l’immobilisme. Sans réelle illusion quant à l’action des politiques, certains ont choisi l’abstention, quand d’autres, tel Bahija, votent sans crainte pour Marine Le Pen, au risque de devoir repartir au Maroc si la candidate parvenait au pouvoir…

En regard de ces témoignages, les analyses des chercheurs (historien, sociologue, économiste et géographe) permettent de comprendre notamment le processus qui a conduit à l’éviction de la classe ouvrière des métropoles, sous le double coup de la désindustrialisation et de la gentrification des quartiers populaires. Et, ce faisant, de combattre, chiffres à l’appui, certaines idées reçues. Comme celle faisant des banlieues des ghettos français, alors même qu’elles sont le lieu d’une grande mobilité.

Lien vers l’enregistrement vidéo du documentaire « La France en face »

Lien vers l’article du Monde

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